« Grâce au financement, permettre aux pros de porter un maximum de projets de rénovation énergétique. » Julien Feasson, directeur général de Femat Solutions

Proposer un accompagnement pertinent aux acteurs du bâtiment performant, c’est la mission de Femat Solutions. Depuis 3 ans déjà, l’équipe de la branche service de notre groupe fait le lien comme mandataire, entre les pros de la rénovation énergétiques et les délégataires du secteur. Objectif : apporter davantage de sérénité sur le financement à des artisans et des entreprises qui doivent faire face à une complexité toujours plus grande des dispositifs d’aide et aux besoins grandissants des clients finaux. Et la tâche n’est pas simple face à un cadre réglementaire qui évolue en permanence. Rencontre avec Julien Feasson, le directeur général de Femat Solutions.

Quelle est la genèse de Femat Solutions ?

Julien Feasson  L’idée est née d’une observation en forme de constat : les délais de paiement des clients installateurs de nos agences Femat étaient de plus en plus longs sans que nous comprenions réellement pourquoi. C’est un fournisseur qui nous a expliqué que les professionnels passaient par le dispositif du certificat d’économie d’énergie (CEE) pour valoriser leurs dossiers et que cela impliquait des temps d’attente plus importants avec un paiement du chantier par un délégataire et non plus par le particulier. En conséquence, il y avait une augmentation du besoin de trésorerie pour les installateurs. Nous avons alors signé un premier puis un second partenariat d’apport d’affaires avec des délégataires.

Que comptiez-vous apporter avec ce service ?

Julien Feasson : Avec la connaissance de nos clients, l’idée était que ces délégataires récupèrent du flux qualifié d’installateurs RGE dans le cadre de la rénovation énergétique. Progressivement, nous avons souhaité nous structurer et il y a 3 ans, nous avons créé Femat Solutions pour accompagner les professionnels ainsi que nos partenaires financiers, notamment AIDEE (association délégataire sur le dispositif CEE) pour laquelle nous sommes devenus mandataires. A la différence de l’apporteur d’affaires, le mandataire construit le dossier et perçoit l’intégralité du flux financier du chantier avant de reverser la partie correspondante à l’installateur. Cela nous permet d’avoir une meilleure maîtrise de nos encours et de mieux accompagner nos clients installateurs.

« Un process très précis pour sélectionner et accompagner les entreprises »

A quels besoins des entreprises répondez-vous avec Femat Solutions ?

Julien Feasson : Notre clientèle est composée de quasiment 100% d’installateurs, clients ou non de Femat Distribution. Avec Femat Solutions, nous répondons à différents besoins. Les délais de paiement représentent le premier sujet car il y a des aléas forts et le dispositif n’établissait pas la confiance nécessaire entre l’installateur et le délégataire ou la structure financeur. Nous pouvons pallier ce manque de confiance en instruisant des dossiers, en endossant le rôle de mandataire et donc en s’assurant de la qualité du dossier envoyé chez le délégataire tout en pouvant garantir un délai de paiement contractuel. Cela résout les problèmes de trésorerie, de délais et de fiabilité du système, et permet d’obtenir la confiance du délégataire.

Justement à quels types d’entreprises s’adresse ce service ?

Julien Feasson : On s’adresse généralement à des entreprises structurées, qui ont du personnel administratif, des poseurs et un dirigeant qui n’est pas sur les chantiers. Dans cette configuration, au final, nous refusons assez peu de professionnels. Nous avons beaucoup d’entrants avec une offre assez innovante notamment sur MaPrimeRénov’, dispositif pour lequel nous garantissons un délai à 7 jours des installateurs et nous sommes peu d’acteurs à le faire. D’autant que la priorité n°1 des professionnels est comment faire payer les dossiers MaPrimeRénov’.

Quelles sont les étapes de l’accompagnement ?

Julien Feasson : C’est un process très précis. La première étape, c’est la rencontre avec le professionnel pour savoir précisément quelles sont ses attentes et voir si nous pouvons l’accompagner. Il s’agit de savoir aussi si notre délégataire accepte de nouveaux dossiers et si nous sommes en capacité de répondre au volume de production. Ensuite, une fois cette évaluation réalisée, nous avons un comité hebdomadaire qui nous permet de déterminer si nous accompagnons le professionnel. Nous faisons un projet de convention et s’il l’accepte, nous le formons à notre process. Les premiers dossiers qui nous arrivent ensuite sont passés à la loupe très fine de la conformité. Enfin, lorsqu’ils sont conformes, nous les envoyons au délégataire pour une nouvelle conformité ou un contrôle sur site qui va valider le projet.

« Grâce à notre veille réglementaire nous servons aussi de phare à la partie distribution qui est très dépendante des subventions »

Comment êtes-vous organisé en interne pour assurer tout ce process ?

Julien Feasson : Nous sommes 6 personnes. La moitié de l’équipe s’occupe de la conformité. L’autre moitié est en charge du commerce. Quant à moi, je fais le lien qui manque parfois entre la conformité et le commerce, je solutionne les problèmes qu’il peut y avoir avec le délégataire ou encore l’Anah. Nous essayons toujours de faire communiquer les cellules de conformité avec les structures commerciales pour toujours ramener du flux avec en vue l’ambition d’intégrer l’aspect humain, trop souvent négligé, dans le domaine de la conformité. Notre connaissance des entreprises nous permet de changer l’appréciation que nous pouvons avoir.

Quelles sont les forces de votre équipe ?

Julien Feasson : C’est notre niveau de veille réglementaire. Elle est une composante essentielle qui change énormément et très régulièrement. Il nous faut être très attentifs et cela très en amont. De cette manière, nous servons aussi de phare à la partie distribution qui est corrélée du niveau des subventions. Un changement de réglementation comme la fin du coup de pouce isolation doit être anticipé pour éviter par exemple des problèmes de stock face à une demande qui s’effondre. Nous devons également être des experts métiers pour que nos dossiers soient conformes. C’est là-dessus qu’est jugée notre crédibilité. Il faut avoir à l’esprit que nos clients, ce sont les délégataires ou l’Anah, ce sont eux qui nous payent. Si nous envoyons des dossiers de mauvaise qualité, nous ne sommes pas payés et cela va bloquer le travail de l’installateur.

« Sur MaPrimeRénov’, nous sommes à environ 150 dossiers par mois, et ce chiffre est en croissance »

En chiffres, que représente votre activité ?

Julien Feasson : Précisons d’abord que sur la partie CEE, nous avons fait une très petite année avec les subventions à la baisse sur l’isolation. Nous allons finir avec un volume aux alentours de 1,5 à 2 millions d’euros. Nous avons en revanche bien développé la partie MaPrimeRénov’ avec un peu plus de 4 millions d’euros financés depuis le mois de mars.
Nous accompagnons environ une trentaine de professionnels, du tout petit poseur qui fait deux chantiers par mois à des structures qui ont industrialisé le process et qui peuvent faire 50, 60 ou même 100 chantiers mensuellement. Sur MaPrimeRénov’, nous sommes à environ 150 dossiers par mois. Ce chiffre évolue car nous sommes sur une phase de croissance avec la recherche de nouveaux partenaires. L’objectif est d’arriver à financier un flux moyen entre 800 000 et 1 million d’euros par mois.

« Si nous voulons qu’il y ait de la rénovation énergétique en France, il faut aller vers une simplification et une uniformisation ! »

Sur l’ensemble des dossiers traités, quels sont les travaux le plus couverts ?

Julien Feasson : Depuis 2022, ce sont essentiellement les travaux de chauffage. La demande s’est déportée sur ce type de travaux parce que les subventions sont désormais orientées sur le chauffage. Ce sont des chaudières biomasses, des pompes à chaleur, un peu moins de poêles à granulés avec l’augmentation du prix des granules. Les installateurs vont évidemment en priorité là où il y a des subventions. C’est au moins 70% de la production. Le reste est réparti entre la ventilation et l’isolation qui est le métier historique de Femat.

Les pouvoirs publics affichent une volonté forte de développer les travaux de rénovation énergétique. Quels sont aujourd’hui les freins à ce développement ?

Julien Feasson : Il y a des crédits : 2,5 milliards d’euros par an pour Ma Prime Rénov’, presque 4 milliards d’euros par an pour les CEE. Mais la sur-complexification mise en place sur les dispositifs est dissuasive. Le fait d’avoir des changements réglementaires très fréquents n’incite pas les entreprises à structurer, à recruter et à développer une vraie compétence. Et je le répète, l’artisan RGE qui est seul est exclu de ces dispositifs. La rénovation énergétique devrait être faite par des installateurs reconnus pour la qualité de leur travail mais ils ne peuvent pas se structurer correctement à cause de ces changements permanents. Si nous voulons qu’il y ait de la rénovation énergétique en France, il faut aller vers une simplification et une uniformisation. Il faut des règles claires notamment en termes de délais de paiement. Les règles sont devenues tellement complexes que les délais d’instruction ont été énormément allongés. Et pour 2023, si on ajoute un Accompagnateur Rénov’, comme c’est annoncé, on va ajouter encore un interlocuteur dans la boucle, c’est de la complexité supplémentaire.

Pour Femat Solutions, l’ambition reste de continuer à se développer ?

Julien Feasson : Évidement ! Nous devons attendre les évolutions réglementaires autour de MaPrimeRénov’. Nous arrivons en fin d’année, il faut donc savoir comment les budgets qui sont en train de se dessiner vont être dépensés et comment nous pouvons être pertinents par rapport à cela.
Sur la partie CEE, même si elle est timide, nous imaginons une reprise l’année prochaine. Elle permettra d’inciter à nouveau les installateurs et les bénéficiaires sur cette question des aides sans que ce soit trop compliqué ou trop long. Le plus déceptif pour un particulier, c’est de se dire qu’il y a des aides mais qu’on ne peut pas en bénéficier parce qu’on ne trouve pas d’artisan RGE disponible. Nous voulons éviter cela et accompagner les professionnels pour qu’ils puissent porter un maximum de projets car je rappelle que le marché de la rénovation énergétique, c’est 45 milliards d’euros par an, c’est colossal et nous sommes une goutte d’eau. Mais nous, le groupe Femat, en étant spécialisé dans ce secteur et en étant capable d’imbriquer le financement, la distribution et la formation, nous avons vraiment à cœur de jouer un rôle dans ce mouvement vertueux.